L’Association canadienne d’ethnologie et de folklore (ACEF) a remis la Médaille Marius Barbeau 2021 à l’anthropologue Jean-François Blanchette pour ses réalisations de carrière. Le prix lui a été décerné lors de l’assemblée générale annuelle virtuelle de l’ACEF le 7 juin.
La présidente de l’ACEF, Joy Fraser, et le président désigné, Laurier Turgeon, ont rappelé les travaux du récipiendaire. Jean-François Blanchette détient un doctorat en anthropologie de l’université Brown, Providence (Rhode Island). Il a été chercheur à Parcs Canada puis conservateur au Musée canadien de l’histoire (autrefois le Musée canadien des civilisations) jusqu’à sa retraite en 2014, alors qu’il reçoit le titre de chercheur associé de cette institution. Il est l’auteur du livre Du coq à l’âme, l’art populaire au Québec, ouvrage qui a reçu le prix Champlain décerné par le Regroupement des éditeurs canadiens-français pour le meilleur ouvrage d’érudition publié en 2014. Il est également coauteur du catalogue de l’exposition Du fond du cœur, l’art populaire au Canada (1983) qui a voyagé partout au pays entre 1984 et 1988. Il est coauteur avec Lise Boily du livre Les fours à pain au Québec, publié en 1976, lequel a reçu une mention honorable de l’University of Chicago Folklore Prize. Il est aussi l’auteur de nombreux articles de revues scientifiques dans les domaines de l’ethnologie, de l’histoire, de l’archéologie historique et de la muséologie.
Le Dr Blanchette est toujours actif malgré sa retraite du musée en 2014. Il se consacre à l’histoire des sculpteurs Bourgault de Saint-Jean-Port-Joli et de leurs émules. Les témoignages des sculpteurs eux-mêmes sont au cœur de ses recherches, « car ils apportent les éclaircissements essentiels à la compréhension de ce mouvement esthétique de sculpture sur bois original, authentique et identitaire» explique-t-il. De plus, il continue à s’impliquer dans divers organismes comme président de la Société québécoise d’ethnologie, administrateur du Musée de la mémoire vivante, administrateur du Domaine Médard-Bourgault et membre du comité d’acquisition du Musée POP.
Le récipiendaire remercie les membres du jury pour cet hommage qu’il considère parmi les plus chers parce qu’il vient des spécialistes du milieu de l’ethnologie. Il mentionne qu’il est redevable à de nombreux guides et mentors qu’il a eus au cours de sa carrière. Plutôt que d’essayer de les mentionner tous et risquer d’en oublier, il préfère raconter quelques éléments de la petite histoire qui ont orienté son parcours :
« Ma première recherche sur le terrain date de mon adolescence alors que j’étais dans le mouvement scout. Une expédition au Lac-Saint-Jean nous avait amenés à monter nos tentes près du cimetière du village industriel abandonné de Val-Jalbert . De nombreuses pierres tombales portaient l’année 1918, ce qui signifiait sans doute qu’il y avait eu une épidémie cette année-là. Notre curiosité nous amena à aller rencontrer Mgr Victor Tremblay de la Société historique du Saguenay qui avait ses bureaux au rez-de-chaussée du séminaire où nous étions étudiants. La grippe espagnole avait fait des ravages partout dans le monde cette année-là. Mais ce n’était pas la raison de l’abandon du village. Alors quelle était-elle? « Il faudrait le demander aux descendants des gens qui ont habité le village », nous suggéra Mgr Victor, comme on l’appelait. L’appel du terrain ne resta pas sans conséquence. Après quelques entrevues avec des descendants des habitants du village et des recherches dans les archives, Mgr Victor nous avança l’argent pour publier notre rapport de recherche, Val-Jalbert et son histoire. Lors de son lancement, Antoine Dubuc, le fils du magnat de la pulpe qui était propriétaire de l’usine de Val-Jalbert au début du XXe siècle, J.E.A. Dubuc, est venu nous encourager et discuter avec nous. Comme je m’intéressais à l’archéologie, il m’offrit « Invitation to Archaeology » de James Deetz.
Des années plus tard, après avoir été initié à l’archéologie par Robert Simard, un professeur du Séminaire de Chicoutimi où j’étudiais, l’idée me vint d’aller étudier l’archéologie avec Deetz qui était professeur à l’université Brown et directeur de la Plantation de Plymouth, l’une des treize colonies américaines. Avec lui, je fis mes études doctorales et grâce à lui je fis la rencontre d’un de ses amis, Henry Glassie, le grand spécialiste des études de l’art populaire et de la culture traditionnelle. Glassie me demanda si je m’intéressais à ce village de sculpteurs québécois dont il avait vaguement entendu parler. Ma réplique fut laconique, je crois, car tout m’intéressait à l’époque. Mais cela me trottait dans la tête et c’est beaucoup plus tard, en 2004, qu’avec mes amis, Jean Simard et le Groupe de travail en art populaire, nous rencontrions quelques sculpteurs de Saint-Jean-Port-Joli qui avaient accepté de nous accueillir pour échanger sur leur histoire et sur leur art. Ce fut là le départ de ma recherche actuelle qui va m’occuper encore pour de nombreuses années, étant donné que les trois maîtres-sculpteurs que furent Médard, André et Jean-Julien Bourgault, ont formé des centaines d’apprentis au cours de leurs carrières et que ces derniers sont devenus eux-mêmes des maîtres qui en ont formé d’autres. Alors voilà comment quelques rencontres m’ont mené à mes recherches actuelles sur l’ethnohistoire de la sculpture à Saint-Jean-Port-Joli. »
Crédits
Rédaction : présentation et propos recueillis par Richard Lavoie
Révision : Louise Décarie
Mise en page : Marie-Ève Lord
Image à la une : La médaille Marius Barbeau 2021 de l’ACEF et son récipiendaire, Jean-François Blanchette
4 commentaires
Toutes mes félicitations Jean-François. Ce fut un plaisir de travailler avec toi sur les textiles des pays andins.
Merci Christiane. Je garde de précieux souvenirs des travaux faits avec toi sur les textiles d’Équateur, du Pérou et de la Bolivie. Les textiles et la documentation que nous avons déposés au Musée canadien des civilisations, devenu le Musée canadien de l’histoire, permettent de témoigner de la créativité des peuples andins. Au plaisir de te revoir.
Tout mes félicitation a toi Jean-François Blanchette pour ce prix de la médaille Marius Barbeau, quel honneur pour nous de ton implication comme directeur au Domaine Médard Bourgault
Domaine Médard Bourgault
par André-Médard Bourgault, président
Merci André-Médard. C’est un privilège de te côtoyer et de collaborer à ton désir de sauvegarde du domaine créé par ton père, le très célèbre sculpteur sur bois, Médard Bourgault.