17 avril 2017 |
En guise d’introduction à cette troisième ciné-rencontre, des organisatrices de la 10e édition du Festival international du film ethnographique du Québec (FIFEQ), Mélanie Moreau et Stéphanie Dumouchel, ont présenté les thématiques inspirantes du festival qui se déroulait du 23 au 26 mars 2017. De son côté, l’ethnologue Philippe Dubois a parlé de la programmation du 26 mars, assurée par la SQE dans le cadre de cet évènement. Notre animatrice Lise Cyr a enchaîné avec de judicieuses informations sur ce qui nous attendait en programme principal.
Tiré de la série Histoires oubliées, le documentaire Jean-Philippe Cyr, curé… cinéaste nous a entraînés dans l’engagement d’un curé pas comme les autres à l’égard du territoire du Témiscouata auquel il s’identifiait. L’enchevêtrement des films expressifs quoique muets de Mgr Cyr défile par le biais d’une trame narrative biographique, d’une dizaine de témoignages de natifs fiers et reconnaissants de s’identifier au personnage, et d’images du territoire soutenues par des mélodies bienfaisantes.
On y découvre l’esprit d’avant-garde de Mgr Cyr, l’homme qui a fait ouvrir une salle de projection dans son village adoptif de Cabano avant même l’arrivée d’un cinéma commercial. Surnommé le père de la famille cabanoise, il a amené l’idée d’une colonisation forestière, voulant protéger l’économie et le gagne-pain des habitants de son coin de pays qui contrastait avec les modèles de développement que le clergé préconisait en cette période de chômage urbain. Dans son témoignage, M. Richard Blanchette le décrit comme un homme d’action qui s’imposait rarement si ce n’est par le regard qu’il portait sur les autres dans ses films.
L’intérêt de Mgr Cyr pour la face cachée de son art est palpable à travers ses plans rapprochés sur des éléments de nature, ses fondus, ses enchaînements et ses montages thématiques bien réglés à une dizaine de minutes. Une fois scénarisés, ces films ont un caractère d’éducation populaire qui traverse les époques et ils sont désarmants d’authenticité lorsque séquencés et captés sur le vif. Ils représentent autant la faune et la flore que des scènes quotidiennes, des événements de divertissement et des techniques de l’industrie forestière, répertoriant des métiers qui donnent maintenant lieu à des séquences d’anthologie telles que celles des draveurs ou des pêcheurs.
Par la suite, Alain Tardif, photographe, président de la Fondation Jean-Philippe-Cyr, et Pierre-André Savard, étudiant au doctorat en histoire à l’Université du Québec à Montréal, ont répondu aux questions des auditeurs.
Malgré un incident technique qui a eu pour effet de nous priver de l’œuvre rétrospective Regard sur le passé — Mgr Jean-Philippe Cyr, cinéaste, réalisée par Alain Tardif, les invités spécialistes ont su tenir en haleine l’auditoire d’une trentaine de personnes. Alain Tardif nous a révélé des récits à la fois surprenants et admirables sur la personnalité de Mgr Cyr. Environnementaliste, celui-ci possédait un chevreuil de compagnie appelé Sapin et avait lancé un programme afin que chaque foyer moins bien nanti ait une chèvre pour son autosuffisance. Il se portait à la défense de la forêt et des animaux, contre la menace des humains, en particulier les braconniers. Innovant, diplômé en physique, une discipline qu’il avait enseignée avant son affectation comme curé, il n’hésitait pas à implanter ses inventions dans le village.
Le doctorant en histoire Pierre-André Savard a présenté avec acuité plusieurs facettes du prêtre-cinéaste, à partir de ses recherches de maîtrise et d’un article qu’il a écrit dans la revue L’Estuaire. Selon le chercheur, ce qui distingue Mgr Cyr des autres prêtres-cinéastes de sa génération, est cet engouement pour des scènes ethnologiques représentatives du quotidien. Il termine en soulignant l’important lien d’amitié entre Mgr Cyr et Mgr Albert Tessier, avec qui il échangeait régulièrement sur des améliorations techniques en cinéma ainsi que sur leurs préoccupations éducatives. À ce titre, Mgr Cyr a présenté plus de 3 000 conférences à travers le Québec, toujours soutenues par les projections de ses films.
Au terme de cette soirée réussie, plusieurs auditeurs ont remercié les intervenants pour leur avoir insufflé le goût de mieux connaître l’œuvre de ce pionnier méconnu et de suivre les activités de la Fondation Jean-Philippe-Cyr.
À ne pas manquer le 26 avril prochain au Cinéma Cartier, la dernière séance de la saison consacrée au documentaire Le Temps et le Lieu de Bernard Émond, qui portera sur la disparition de la culture paysanne traditionnelle québécoise. Ce documentaire concerne plus spécifiquement le séjour d’Horace Miner, anthropologue américain, à Saint-Denis-de-Kamouraska au cours des années 1930.
2 commentaires
Excellent Valérie ! Bravo !
Merci, il s’agissait d’une autre séance aux contenus riches!