7 février 2018 |
Décès de Francine Brunel-Reeves
Francine Brunel-Reeves, « grand-mère de la musique trad », comme l’appelait son ex-collègue Yves Bernard, s’est éteinte le 3 février à l’Hôpital général juif de Montréal, des suites d’un cancer fulgurant. Elle avait 84 ans. La veille, quelques membres de la famille ainsi que des amis musiciens lui ont fait l’honneur d’un moment de chansons autour de son lit, où elle esquissa un sourire et battit un moment la mesure avec son pied.
Chanteuse, « câlleuse », guitariste, compositrice et chercheuse autodidacte en musicologie et ethnologie, Francine Brunel-Reeves a chanté la musique du terroir québécois en France pendant près d’une trentaine d’années. On la considère comme la pionnière de la chanson traditionnelle. Épouse de Hubert Reeves et mère de quatre enfants, elle a vécu en France de 1964 à 1991. À Paris, elle a mené une carrière de chanteuse en lançant des bals québécois animés de musique traditionnelle et de « câll ». Elle a participé au mouvement folk français à travers les groupes La Maudite Gang et Les Maudzits Français. Elle a fait ainsi connaître le répertoire québécois, entre autres Félix Leclerc, Gilles Vigneault et Claude Léveillée.
En plus de sa carrière d’artiste, elle a suivi entre 1984 et 1988 des cours de danse et d’ethnologie à la Sorbonne, comme auditrice libre. Elle a mené une carrière de chercheuse passionnée, où elle s’est intéressée à la chanson traditionnelle, entre autres à ses racines acadiennes [de la chanson], sujet sur lequel elle a grandement écrit. Elle documente la chanson à travers l’enregistrement d’un corpus de vieilles chansons et des « histoires séculaires ».
Elle a fait l’objet d’un film en 2008, Tant qu’il reste une voix, de Jean-Nicolas Orhon. Un article de Marc Bolduc, chercheur indépendant en tradition et animateur de Tradosphère à CKVL, lui est aussi consacré la même année dans la revue Rabaska ( vol. 6, 2008, p. 79–92 ). Membre de la Société québécoise d’ethnologie, elle a publié dans cette même revue deux articles consacrés à ses sujets de prédilection : la chanson, « Les États-Unis et la Blanche Biche » ( vol. 2, 2004, p. 51–89 ) et un des interprètes de la Blanche Biche, Alphonse Morneau, « L’homme aux 400 chansons n’est plus » ( vol. 8, 2010, p. 165–177 ).
Pour lui rendre hommage et offrir nos sympathies aux proches et aux parents, nous sommes conviés au Salon funéraire Alfred Dallaire Memoria, 1111 rue Laurier Ouest, Montréal, le jeudi 15 février en après-midi et en soirée. Les funérailles auront lieu le vendredi 16 février à 11 h , à l’Église Saint-Germain d’Outremont (coin Côte-Ste-Catherine et avenue Vincent d’Indy).
Élise Bégin, Société québécoise d’ethnologie
La photo à la Une est tirée du TRAD Magazine.
5 commentaires
Merci Francine pour les moments forts que j’ai passés avec vous et avec Hubert, pour tout ce que vous m’avez apporté, plus ou moins à mon insu et que je revis au fil du temps. Je n’ai pas oublié, même si les dérives de nos continents respectifs nous ont éloignées en apparence. Et votre souvenir c’est encore un beau cadeau qui me reste de vous.
Combien de fois Francine m’a-t-elle ouvert son grand coeur et son gîte! On écoutait Giovanna Marini, Chantal Grimm (que je salue ici), Annkrist et Brigitte Fontaine tout en parlant de La Blanche Biche, de l’Écolier Assassin ou de la Bergère Muette… Cette femme extraordinaire m’a révélé la grandeur poétique du folklore. Merci et Chapeau Francine Reeves.
Francine Reeves a été aussi, sur ma proposition, co-organisatrice d’un Festival, “chanson de femme”, à Paris (Théâtre Mouffetard) et à Bruxelles (Halles de Schaerbeeke) qui a changé en 1976 l’image de la femme dans la chanson à texte en France en faisant connaître une cinquantaine d’auteures (ou d’auteures-compositrices)-interprètes dont la plupart étaient inconnues. Son engagement féministe et son apport personnel à la chanson poétique, antérieur à son immersion dans le chant et la danse traditionnels, méritent aussi d’être cités.
J’ai été très peiné d’apprendre le décès de Francine. J’aimais cette femme de cœur, chaleureuse, à la bonne humeur contagieuse. Ces qualités et beaucoup d’autres, dont son érudition, elle a su les partager lorsqu’elle était au conseil d’administration de la Société québécoise d’ethnologie. Au revoir, chère Francine. Pour toi, un bouquet de myosotis imaginaire : Nous nous souviendrons de toi.
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J’adresse un remerciement à Marc Bolduc, auteur de l’article sur Francine, publié dans notre revue Rabaska : un beau portrait. Également, pour l’entrevue qu’il a accordée au journal Le Devoir, où il la présente si bien par son témoignage bien senti. Marc a également été membre du conseil d’administration de la SQE.
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Merci aussi à notre collègue Élise Bégin pour ce bel article et pour les nombreux liens qui nous permettent de visiter Francine de diverses façons.
Grand merci pour cette biographie de notre belle Francine très douée. Cette femme était exceptionnelle.
Conjointe de son frère André