Ce condensé est tiré de l’article de Paul-Louis Martin publié initialement dans la revue Rabaska, volume 18, 2020, p. 43–87.
Les origines de la pêche sportive remontent à l’arrivée des Anglais, unanimement reconnus comme les véritables inventeurs de cette pratique en Occident. Elle est considérée comme une activité de loisir exclusivement pratiquée par une élite qui pouvait se permettre d’avoir un contact avec ce que la nature sauvage pouvait offrir et ainsi contempler les rivières et les eaux vives. Par contre, les premiers récits de pêche démontrent que cette pratique est plus qu’un sport. Elle est représentée comme une nouvelle valeur en tant que culture qui s’est déployée dans tout le pays et qui a été influencée en quelque sorte par la pensée romantique qui a eu un large impact sur la vie artistique et sociale en Occident. Le pêcheur sportif se présente comme un militaire de haut rang, major ou surintendant du service de l’armée britannique, ces spécialistes du domaine possédant une formation clé et un salaire normal qui les positionnent parmi les membres privilégiés de la société. Pendant au moins 300 ans, la pêche à la mouche a été associée aux catégories sociales les plus favorisées de la société britannique comme le golf, le thé et le whisky, la plaçant ainsi comme une activité profondément respectée. Avec la croissance rapide des villes au XIXe siècle, la dégradation du niveau de vie et la vulnérabilité aux épidémies, un sentiment commence à se développer chez les urbains pour chercher de l’air pur, de grands espaces et ainsi pouvoir sortir de ce chaos.
Progressivement, la pêche sportive devient très populaire et c’est en raison de ces facteurs que les compagnies de navires commencent à proposer des voyages et des excursions qui peuvent répondre aux besoins, permettant ainsi aux voyageurs de pêcher la truite et le saumon. La publicité de ces itinéraires devient si populaire au point où ils sont promus par les journaux et les guides touristiques, stimulant la volonté de trouver les bienfaits de la nature. Au fur et à mesure que ce sport devenait si populaire, la nécessité de créer des clubs privés pour la protection et la conservation des poissons, de la faune et gibier commença à se faire sentir, créant ainsi 50 clubs privés entre les années 1885 à 1896, augmentant leur nombre à 300 en 1914 et à 600 avant la Seconde Guerre mondiale. Peu à peu, une combinaison de facteurs accompagne la démocratisation de la pêche sportive grâce à l’augmentation des moyens de transport et des routes donnant ainsi accès à de nouveaux territoires. Bien que la pêche sportive soit encore à approfondir, elle montre un chemin bouleversant fondé sur la discrimination sociale et l’inégalité des revenus. La pêche à la ligne peut être considérée comme la victoire d’un long combat populaire pour démocratiser les loisirs et ainsi se réapproprier toutes les richesses de notre territoire.
Crédits
Recherche et rédaction : Liz Pamela Fajardo
Révision : Louise Décarie
Mise en page : Marie-Ève Lord
Illustrations : tel qu’indiqué au bas des vignettes
On peut se procurer un exemplaire de la revue Rabaska ici.
Image à la une : Fosse à saumons sur la rivière Godbout. Huile sur toile de Frederick Arthur Verner, 68 x 122 cm, 1877. © Musée national des beaux-arts du Québec, 1948.115 ; photo : Jean-Guy Kérouac