Le 18 octobre 2024
Ce portrait est tiré de l’article de Bertrand Bergeron intitulé « Jean Du Berger. L’ethnologue et le conteur » publié initialement dans la revue Rabaska (volume 15, 2017, p. 131–136).
Ethnologue, conteur, pédagogue, chercheur et conférencier, Jean Du Berger fait partie de ce groupe de pionniers qui a façonné le développement de l’ethnologie québécoise à l’Université Laval. Son parcours est riche et témoigne d’une pratique ethnologique à la fois dynamique et novatrice qui s’est étendue au-delà du milieu universitaire. Curieux et d’une grande érudition, il s’est intéressé à une multitude de sujets. En plus du folklore et de l’ethnologie qui le passionnaient, il a enseigné le cinéma, le théâtre et la littérature. Il s’est spécialisé plus particulièrement dans le champ des contes et des légendes de l’Amérique française tout en développant celui inédit de l’ethnologie urbaine.
Formé en philosophie et en lettres, Jean Du Berger enseigne d’abord au niveau collégial. Puis, il devient professeur de littérature canadienne et d’ethnologie en 1964. Il intègre l’Université Laval au moment de cet âge d’or des Archives de folklore. Il y côtoie Luc Lacourcière et toute son équipe alors animés par un sentiment d’urgence qui dominait et commandait la pratique d’une « ethnologie de sauvegarde ». Ses recherches se concentrent d’abord sur la tradition orale. En 1981, il soutient sa thèse de doctorat intitulée Le Diable à la danse : étude d’un corpus de légendes sur le Diable justicier. Membre actif des Archives de folklore, puis du CELAT (alors le Centre interdisciplinaire d’Étude sur les Lettres, les Arts et les Traditions), Jean Du Berger préside également l’Association canadienne de folklore (1989–1990) et le Centre de valorisation du patrimoine vivant (1988–1993). Officiellement à la retraite de l’enseignement à partir de 1998, il continue de partager son savoir, de faire de la recherche, d’écrire et de participer à des colloques. Il est chargé de cours à l’Université de tous les âges de l’Université Laval de 1996 à 2009. Sa carrière exceptionnelle et son importante participation au rayonnement de la discipline sont reconnues. Il reçoit plusieurs distinctions, comme la médaille Luc-Lacourcière pour l’année 1996–1997, la médaille Marius-Barbeau en 2001, ainsi qu’un doctorat honorifique de l’Université de Sudbury en 2006.
Jean Du Berger a beaucoup écrit. Il est l’auteur de nombreux articles publiés dans des journaux, des revues à grand tirage et des périodiques scientifiques. Il publie également Les ouvrières de Dominion Corset, 1886–1988 en 1993 (avec Jean Mathieu et Jacques Mathieu) et La radio à Québec: 1920–1960 en 1997 (avec Jean Mathieu, Jacques Mathieu et Martine Roberge). La publication de ces deux ouvrages est importante, car elle illustre la pertinence du champ de l’ethnologie urbaine qu’il cherche alors, avec ses collègues, à défricher. Il est également l’auteur de la Grille des pratiques culturelles (1997) et du livre Le Diable à la dance (2006). Ce dernier titre est une version remaniée de sa thèse de doctorat dans lequel il propose une étude exhaustive sur la présence du diable dans la tradition orale.
Jean Du Berger a toujours été reconnu comme un excellent orateur, un communicateur efficace, un vulgarisateur hors pair et un conteur talentueux. Ces qualités ont fait de lui un personnage attachant animé par sa passion pour la tradition orale et son désir de transmission. Au cours de sa carrière, il prononce de nombreuses conférences destinées au grand public. Il choisit de s’adresser à des auditoires variés cherchant à agir sur cette image collective d’une culture traditionnelle dévalorisée. Il participe à plusieurs projets télévisuels et émissions radiophoniques. De 2000 à 2004, il s’implique également dans sa communauté avec passion, notamment en tant que bénévole au Centre de jour de la Maison Michel-Sarazin. Il y propose des ateliers de contes et permet aux bénéficiaires de partager leurs récits de vie.
Enfin, grâce à sa proximité avec les fondateurs des Archives de folklore qu’il a côtoyés et à sa participation active à leur développement, notamment en tâchant d’ouvrir la recherche ethnologique au folklore urbain, il est aussi devenu au fil des ans l’historien incontournable de ces archives. À l’intérieur comme à l’extérieur de l’université, Jean Du Berger a fait rayonner l’ethnologie et la culture qu’elle étudie. Avec sa voix chaleureuse, il a porté nombre d’apprentis ethnologues et encouragé 2018 (CC BY-SA 4.0).plus d’un à s’engager dans la valorisation du patrimoine vivant et de la culture populaire. Il est décédé à Québec le 1er décembre 2021, à l’âge de 88 ans.
Crédits
Rédaction : Laurence Provencher-St-Pierre
Révision : Louise Décarie
Image à la une : Jean Du Berger 2012. Photo Richard Lavoie
Quelques références
Du Berger, Jean. Le diable à la danse. Québec, Presses de l’Université Laval, « Ethnologie de l’Amérique française », 2006, 246 p.
Du Berger, Jean et Jacques Mathieu, sous la direction de. Les ouvrières de Dominion Corset à Québec, 1886–1988. Québec, Presses de l’Université Laval, « Laboratoire d’ethnologie urbaine », 1993, 148 p.
Du Berger, Jean. Grille des pratiques culturelles. Québec, Les éditions du Septentrion, 1997, 406 p.
Du Berger, Jean, Jacques Mathieu et Martine Roberge. La radio à Québec : 1920–1960. Québec, Presses de l’Université Laval/IG, « Laboratoire d’ethnologie urbaine », 1997, 298 p.
Pour aller plus loin
Du Berger, Jean. « Une ethnologie de contact ». Rabaska, vol. 7, 2009, p. 27–44. https://doi.org/10.7202/038334ar
Du Berger, Jean. « Un ethnologue chez les oncologues ». Rabaska, vol. 10, 2012, p. 125–128. https://doi.org/10.7202/1013544ar
Du Berger, Jean. « Un musée du conte : une muséologie des pratiques orales ». Rabaska, vol. 4, 2006, p. 7–13. https://doi.org/10.7202/201759ar
Roberge, Martine. « Jean Du Berger (1933–2021) ». Rabaska, vol. 20, 2022, p. 244–247. https://doi.org/10.7202/1093903ar
Un commentaire
M. Du Berger m’a fait découvrir un monde que je ne connaissais pas: le nôtre. Enseignant dévoué, sympathique et passionné, il savait nous motiver.
Un étudiant aux Études canadiennes, de 1965 à 1969,
Armand Labbé
Originaire de Percé