15 mars 2017 |
La soirée a commencé avec la projection du documentaire Le Temps des sucres, une série de deux documentaires réalisée par Michel Lessard et François Brault. Leur diffusion n’aurait pas pu mieux convenir à cette période d’approche du printemps.
Le cinéma Cartier de Québec paraissait plus familier au groupe de passionnés des traditions de la SQE, qui l’apprivoisait pour une deuxième fois. Malgré la perte de qualité visuelle inhérente au transfert du fragile support original, la richesse et la qualité des contenus ont très vite captivé tout l’auditoire de près d’une trentaine de personnes.
Ces documentaires sont ponctués de récits instructifs, de témoignages personnels imagés et d’envolées musicales d’une douce nostalgie qui proposent des découvertes, sous forme de schéma, de dessins, d’archives, etc. Il s’agit d’un clin d’œil au patrimoine immatériel retraçant la genèse des produits d’érable jusqu’à leur industrialisation. La qualité des recherches historiques sur le sujet, de même que la pertinence des enquêtes ethnologiques n’ont pas manqué de nous mettre l’eau (d’érable) à la bouche.
L’épisode La Récolte de la sève souligne l’origine amérindienne des sucres et de l’un de ses moyens de transport, les raquettes, qu’il fallait savoir utiliser selon le type de neige. Cette « maladie d’entailler » représentait un revenu d’appoint avant les semences du printemps. Le narrateur révèle qu’à l’arrivée des corneilles ou encore après la sortie des « siffleux », « il fallait ouvrir la neige qui a neigé et pelleter jusqu’aux larmiers du toit ». À demi-mot, il ajoute qu’il était coutume de laisser la cabane ouverte, sans la verrouiller, avec des allumettes dans une boîte de fer-blanc, au cas où quelqu’un, égaré pendant l’hiver, y trouverait refuge.
Les Façons de sucre raconte la grande fête des sucres, une ode au retour du printemps. Après le croissant de la lune d’avril, la sève est abondante et « chacun doit faire ses gestes », en se relayant. Représentant la 5e génération à « courir les érables », Richard Viateur commente le labeur d’équipe ardu que représentait la fabrication du sucre d’érable, suivi de la fête à l’esprit familial, presque mythologique, dans un accent fort non sans émoi. On sent la précision des gestes à travers une panoplie de palettes de bois toutes plus différentes les unes des autres. L’enchantement du démoulage du sucre d’érable, des plus simples cornets d’écorce aux plus sculptés des cœurs de sucre, est manifeste.
Après la projection, René Bouchard a animé la discussion entre Michel Lessard, le public conquis et les acériculteurs invités par l’ethnologue Bernard Genest. Michel Lessard a rendu un hommage vibrant à ses collaborateurs de la série Un pays, un goût, une manière qui travaillaient dans des conditions loin d’être idéales. Selon lui, ces rencontres de tournage ont été une occasion de mettre en valeur l’importance de léguer le patrimoine matériel. Les interventions se sont poursuivies avec Jean-Yves Marcoux, 4e génération d’acériculteurs de Saint-Elzéar, qui a mentionné les gains plus importants que permettaient les pains de sucre, vendus au poids. Ensuite, Yvan Labbé, 6e génération d’acériculteurs de Sainte-Marie de Beauce, a raconté qu’il dormait sur une table de la cabane, réchauffé par un fanal, en attendant de récolter l’eau d’érable. Enfin, Laurent Laverdière et Nicole Poulin, un couple d’acériculteurs de Sainte-Marguerite, ont souligné notamment la signature de terroir, typique de chaque famille et préservée malgré la modernité de la pratique. Le dynamisme provoqué par les discussions entre le passé et le présent a rendu cette séance unique.
Nous vous convions par cette même occasion à la troisième ciné-rencontre, le 22 mars 2017 à 19 h, qui portera sur l’œuvre filmique de l’abbé Jean-Philippe Cyr.
Image en Une : Sugar scene at Maple Wood, Dunham, Québec, s.d. (carte postale)
Toutes les photographies sont de Valérie Roussel.
Un commentaire
Bonjour,
J’ai bien aimé le visionnement des 2 films.
Belle soirée et bons échanges.
Nicole P.